Le Journal de Thomas Jill Wiernon

Le Journal de Thomas Jill Wiernon

Retour d'astreinte n°2

Retour d'astreinte n°2 by Thomas Jill Wiernon is licensed under CC BY-NC-ND 4.0

 

Je glisse la clé dans la serrure. Deux tours dans le sens horaire dévérouillent sur un glissando de cliquetis ma porte d'entrée. J'éprouve une légère anxiété. Qu'est-il advenu de Miss Doudou pendant ce long weekend, seule à la maison ? Je pousse doucement le battant en cherchant une petite boule noire sur le sol. Je me détends d'un coup. Miss Doudou est là et bien là, juchée sur son séant, son regard planté dans le mien, très exactement à l'emplacement où elle somnolait vendredi après-midi, lors de mon départ. Le temps reprend son cours. J'achève d'entrer dans mon studio tractant mon caddy de course que j'utilise aussi aux fins de transporter mon nécessaire d'astreinte et les provisions pour le temps de mon service. Devant cet étrange équipage, Miss Doudou s'éloigne par précaution, s'assoit sous la table de la cuisine puis m'observe avec curiosité. Je m'accroupis et l'appelle, tapotant le carrelage de la main droite. D'un bond dans ma direction elle vient aussitôt chercher une caresse. -

- Oh ! Miss Doudou ! Bonjour ma jolie ! Tu ne m'en veux pas ?

Elle se frotte à moi puis glisse entre mes jambes pour courir ensuite en direction du ramequin de croquettes. Le distributeur d'un litre que j'avais pris soin de remplir aux trois quarts témoigne de l'appétit d'ogre de la chatte : un jour de plus et c'était la disette ! Je suis rassuré. Miss Doudou mange bien, se repose et ne refuse pas mes approches et mes marques d'affection. Bien au contraire ! Il me reste cependant un dernier petit test à réaliser. Je gravis quatre à quatre les marches desservant ma mezzanine. Je m'allonge pour m'octroyer enfin ! quelques heures d'un sommeil authentique sur lequel ne pèsera plus la probabilité d'une alerte. Miss Doudou cherchera-t-elle à me rejoindre ? J'attends. Pour patienter un peu, j'entame la rédaction de ce billet tout en tendant l'oreille. Quelques minutes s'écoulent quand, soudain, des petits pas feutrés et rapides trahissent l'arrivée imminente de Miss Doudou. Sa petite tête surgit au sommet de l'escalier et en un éclair elle me rejoint sur le lit. A nouveau, comme la semaine passée, elle regarde longuement, très longuement autour d'elle !

- Oui, je sais Doudou ! Tu ne comprends pas pourquoi la présence que tu pressens ne se matérialise pas... Je t'expliquerai, Doudou... Je t'expliquerai un jour ! pensè-je avec l'espoir qu'un tel jour n'advienne jamais.

Miss Doudou s'allonge alors à vingt centimètres de moi, à peine. Elle me regarde avec attention avant d'offrir son menton à mes caresses. J'effleure de l'extrémité de mon index son larynx. Il vibre doucement au gré de son ronronnement délicat. Rassérénée, la voilà qui s'abandonne graduellement : ses paupières se ferment irrésistiblement. Elle s'endort, paisible, pour rêver sûrement de campagnols, de souris ou de montagne de croquettes !

- Dors ! Dors, ma jolie ! Nous retournerons bientôt chez le vétérinaire pour relever à nouveau soigneusement ton tatouage ! S'il existe, quelque part, un maître qui te pleure, je dois impérativement le retrouver pour votre commun bonheur.



13/06/2022
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